jeudi 25 décembre 2014

1940 LA DEBACLE

Année 1940


Le film « la bicyclette bleue « avec Laetitia Casta m’a fait revivre quelques jours de juin 1940. Déjà dès le début du mois, nous avons vu beaucoup de passages de troupes et de réfugiés venant de Belgique, envahie dès le 10 mai. Mais le dimanche 15 juin, c’était l’afflux !


 Nous apprenons que les ponts de Cosne et de Gien, sur la Loire, ont « sauté ». Des militaires occupent nos chambres à l’étage. Le lundi matin, les camions de Mallet-Rateau d’Aubigny sur Nère roulent vers Bourges par Presly, Méry es, Allogny afin d’éviter la nationale. Mon père pris peur et nous confectionna de petits sacs pour entreposer argent ou bijoux à la ceinture au cas ou il nous faudrait partir aussi. 


Au magasin, c’était la queue. Espadrilles, chaussures, chaussettes ont été dévalisées. Les soldats laissaient leurs brodequins sur le trottoir devant la devanture et d’autres les récupéraient…


 Un sac de riz en vrac, étalé entre la porte de la salle et le couloir aux réserves, un autre de pâtes ont été vidés en quelques heures ainsi que tout ce que nous pouvions avoir à manger. Un groupe de militaires a moulu des kilos de café dans le grand moulin du magasin, venant écouter la radio dans la cuisine, disant «  si les boches ne nous suivent pas, c’est qu’ils le veulent bien… »


 Le mercredi 18 juin, La Chapelle d’Angillon a été bombardé par les Italiens  (en réalité, il s'agissait de bombardiers allemands; au moins 120 morts. Lire à la fin). Dès la nouvelle connue, panique chez les réfugiés présents dans le couloir, sous l’escalier…

Dans la nuit de jeudi, grand branle-bas, les militaires partaient au plus vite et, vers 6h du matin, nous sommes de nouveau réveillés par du vacarme dehors. Papa, mettant le nez à la fenêtre dit : « les bôches sont là ». 


Ils stationnaient dans la rue devant la mairie voisine. Peu de temps après, nous entendons des coups à la porte du magasin. Papa descend et nous le suivons… Il ouvre à un groupe de soldats allemands. Ils « baragouinent » » : « tailleur, machine à coudre… » puis suivent papa vers l’atelier situé à l’étage. Maman et moi les suivons. Le couturier du groupe souhaitait coudre les galons gagnés par les soldats au cours de la campagne !


  C’était le 20 juin. Les Allemands sont passés devant la maison toute la matinée. Des soldats français prisonniers ont été enfermés dans l’église puis, le soir tard, les soldats allemands stationnant à Méry es sont venu se ravitailler. Certains étaient passés dans la journée, en nous recommandant de leur garder des victuailles afin d’éviter des représailles. 


Je me revois encore à la caisse du comptoir épicerie, essayant de me débrouiller avec leur monnaie d’occupation à la lueur d’une lampe électrique avec, comme garde du corps, la tante Louise, âgée de 70 ans, menue, boitillante, mais bon gendarme ! Malgré tout, un paquet de 3 kg de chocolat d’Annecy mis en réserve est parti ! 


En cette seule journée, la recette a atteint 6000 francs soit celle d’un petit mois !


Ce même jour, 18 juin 1940, à seulement 8 kilomêtres :

" Vers 19h, une trentaine de bombardiers allemands déversent leurs bombes sur le champ de foire de La Chapelle d'Angillon sur lequel se trouve une foule de réfugiés et font un massacre. " La Gazette Berrichonne " du 3 août 1940 rapporte:


" Bouleversé, parsemé d'énormes trous, c'était des cadavres un peu partout, des dizaines de chevaux foudroyés, des voitures renversées, calcinées, des arbres brisés. 

Trente maisons dans le village ont été détruites en totalité ou en partie. L'aile principale du château a reçu une bombe et la toiture s'est effondrée. Il est impossible d'évaluer exactement le nombre des victimes. 


On a retrouvé et inhumé 104 cadavres, dont 5 appartenaient à la population. Mais beaucoup de corps ont été pulvérisés et déchiquetés et le nombre important de crânes, membres ou fragments isolés qui ont été recueillis permet d'affirmer que le nombre de morts n'est pas inférieur à 120, dont 53 seulement ont pu être identifiés.

 Le nombre exact des blessés n'est pas connu, les moins atteints ayant fui, mais il n'est pas exagéré de le fixer à une cinquantaine "."


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